Je m’interroge souvent sur la situation dans laquelle la société se trouve. La question du travail est passionnante car elle est intimement liée aux aspects sociologiques et à la place de l’homme dans la société.
J’entame donc à cette occasion une série de billets sur ce thème.
Il y a un texte que je voulais partager de Théodore Kaczynski : La société industrielle et son avenir.
Avant tout, voici une précision sur l’auteur :
Unabomber, de son vrai nom Theodore John Kaczynski (né le 22 mai 1942 à Evergreen Park dans l’Illinois) est un mathématicien et terroriste américain. Jusqu’à maintenant, il a fait l’objet de la chasse à l’homme la plus coûteuse du FBI.
Le 22 janvier 1998, Theodore Kaczynski a reconnu devant un tribunal californien être le terroriste que la police avait dénommé «Unabomber»; et par là même être l’auteur du manifeste — Industrial Society and Its Future — dont «Unabomber» avait obtenu la publication dans la presse, en assurant qu’il cesserait en échange les attentats à la bombe qu’il commettait depuis dix-sept ans. Ces attentats, destinés selon leur auteur à frapper des individus liés à la recherche scientifique ou diversement impliqués dans la promotion du progrès technique, avaient fait trois morts — le propriétaire d’un magasin d’ordinateurs, un cadre d’une compagnie de publicité et le président de la corporation des exploitants forestiers de Californie —, ainsi qu’une vingtaine de blessés. Dénoncé par son frère, qui l’avait reconnu grâce aux indices fournis par le texte du manifeste, Kaczynski avait été arrêté le 3 avril 1996. Lors de son procès, commencé en novembre 1997, le droit d’assurer lui-même sa défense lui fut refusé, le juge invoquant sa «schizophrénie paranoïde» et sa volonté de «manipuler le procès» ; il finit donc par accepter de plaider coupable et fut condamné à la prison à vie.
Selon le site affaires-criminelles.com :
Kaczynski a également été suspecté d’être le fameux serial killer Zodiac, dont l’identité n’a jamais été établie.
C’est donc un auteur un peu particulier !
Il décrit le système industriel comme un système réduisant les hommes à de simples rouages pouvant être indifféremment remplacés et n’accepte pas que la société puisse continuer à fonctionner de cette manière ce qui le mène à commettre des actes terroristes.
Malgré la teneur rétrograde du texte et sa haine du progrès des idées intéressantes méritent d’être lues.
La notion d’activité compensatrice est intéressante et le lien avec la société de consommation peut être fait : ainsi il est communément admis que tout bien que tu détiens est un soucis qui te retiens.
Le fait qu’il évoque la perte de sens de la vie pour beaucoup de personnes et le fait que pour survivre il ne faut qu’un minimum d’intelligence mérite d’être discutée. Evidemment, lorsqu’on voit le nombre de personnes sans ressources ou sans domicile, cette idée peut paraître révoltante mais l’auteur l’exprime en comparant cette situation avec la situation à l’aire primitive. Je l’interprète plutôt dans le sens du principe de peter qui évoque le fait que les gens incompétents, modérément compétent et compétents arrivent à garder leur poste alors que les super compétents n’y arrivent pas (justement car ils n’obéissent pas).
En voici une sélection :
LE PROCESSUS DE POUVOIR
33. (en) Les êtres humains ont un besoin (probablement d’ordre biologique) pour quelque chose que nous appellerons le « processus de pouvoir ». Il est apparenté au besoin de pouvoir (qui est bien connu) mais qui n’est pas exactement la même chose. le processus de pouvoir comprend 4 éléments. Parmi les 3 les plus facilement identifiables, nous citerons le but, l’effort et la réalisation du but (tout le monde a besoin de buts dont la réalisation demande des efforts et a besoin de réaliser au moins quelques uns de ces buts). Le quatrième élément est plus difficile à définir et n’est pas nécessaire à tout le monde. Nous appellerons l’autonomie et nous en discuterons plus loin (paragraphes 42-44).
34. (en) Prenons comme hypothèse le cas d’un homme qui obtiendrait tout ce qu’il veut simplement en le désirant. Cet homme a du pouvoir, mais il va aussi avoir de sérieux problèmes psychologiques. Au début, cela l’amusera beaucoup, mais au fur et à mesure, il finira par s’ennuyer et par être démoralisé. Eventuellement, il peut devenir dépressif, au sens clinique du terme. L’histoire nous montre que les aristocraties sybarites ont fini par devenir décadentes. Ce n’est pas vrai pour les aristocraties combatives qui avaient à se battre pour conserver leur pouvoir. Mais les aristocraties indolentes et bien installées qui n’avaient pas besoin de défendre leurs prérogatives sont souvent devenues blasées, hédonistes, et démoralisées, quant bien même elles détenaient le pouvoir. Ceci montre que le pouvoir n’est pas tout. On doit avoir des buts permettant d’exercer ce pouvoir.
35. (en) Tout le monde a des buts ; au moins acquérir le minimum vital : nourriture, eau, de quoi se vêtir et s’abriter. Mais l’aristocratie désœuvrée obtient tout cela sans effort. D’où son ennui et sa démoralisation.
36. (en) L’échec à réaliser des buts importants amène à la mort s’ils concernent des besoins vitaux, et à la frustration s’ils ne mettent pas en danger la vie du sujet. Des échecs graves pour parvenir aux buts d’une vie conduisent au défaitisme, à la faible estime de soi, et à la dépression.
37. (en) Ainsi, pour éviter de graves problèmes psychologiques, un être humain a besoin de buts qui nécessitent un effort, et il doit avoir une chance raisonnable d’aboutir à ses fins.
LES ACTIVITÉS COMPENSATRICES
38. (en) Mais toutes les aristocraties désœuvrées ne succombent pas à l’ennui et à la démoralisation. Par exemple, l’empereur Hirohito, au lieu de sombrer dans un hédonisme décadent, s’occupa de biologie marine, domaine dans lequel il devint un expert. Quand les gens n’ont pas à se débrouiller pour satisfaire leurs besoins primaires, ils se créent des buts artificiels. Dans la majorité des cas, ils poursuivent ces buts avec la même énergie et le même enthousiasme que s’il s’agissait d’assouvir un besoin naturel. Ainsi, les aristocrates de l’empire romain avaient des prétentions littéraires ; de nombreux nobles européens d’ il y a quelques siècles dépensaient un temps et une énergie folle à la chasse, bien qu’ils n’aient eu nul besoin de la viande ; d’autres sont entrés en compétition pour leur rang par un étalage de richesses ; et quelques uns, comme Hirohito, se sont tournés vers la science.
39. (en) Nous avons utilisé le terme de « activités compensatrices » pour désigner une activité dirigée vers un but artificiel qu’une personne s’est inventé pour simplement avoir quelque chose vers lequel tendre et œuvrer, ou selon ses dires pour la satisfaction personnelle qu’elle tire de cette activité. Ceci est une règle d’or pour identifier une activité compensatrice. En présence d’une personne qui passe le plus clair de son temps à la poursuite d’un but X, demandez-vous : si elle employait tout son temps et son énergie à satisfaire des besoins vitaux, et si cet effort nécessitait de sa part l’emploi de toutes ses facultés intellectuelles ou physiques de manière variée et intéressante, serait-elle vraiment frustrée de ne pouvoir atteindre le but X ? Si la réponse est non, alors cette personne s’adonne à une activité compensatrice. Les études de Hirohito sur la biologie marine constituent clairement une activité compensatrice, puisqu’il est presque certain que s’il avait eu à occuper son temps à d’intéressantes activités non-scientifiques pour assurer sa subsistance, il n’aurait pas été frustré de ne pas tout connaître de l’anatomie et de la vie des animaux marins. D’un autre côté, la recherche d’amour ou de sexe (par exemple) n’est pas une activité compensatrice, car la majorité des gens, même si leur existence est par ailleurs satisfaisante, seraient extrêmement frustrés s’il n’avaient de leur vie aucune relation avec un membre du sexe opposé (toutefois, une frénésie de sexe peut-être considérée comme une activité compensatrice).
40. (en) Dans la société industrielle moderne, un effort minimal est nécessaire pour subvenir aux besoins vitaux. Il suffit de suivre un programme approprié pour acquérir une minable compétence technique, puis d’aller travailler et de déployer un effort des plus modestes pour conserver le job. Les seules qualités requises sont une intelligence raisonnable, et surtout de OBÉISSANCE. Si vous possédez tout cela, la société prendra soin de vous du berceau jusqu’à la tombe (bien entendu, il y a une « sous-classe » sociale qui ne peut tenir la satisfaction des besoins primordiaux comme acquise, mais nous parlons ici de la majorité de la société). Ainsi il n’est pas surprenant que la société moderne soit pleine d’activités compensatrices. Par exemple : les travaux scientifiques, le sport, les activités humanitaires, la création artistique, grimper les échelons de votre entreprise, acquérir de l’argent et des biens matériels bien au-delà du point où cela vous apporte une réelle satisfaction, et l’activisme social quand l’activiste s’occupe de choses qui ne le concernent pas personnellement, comme les activistes blancs préoccupés par les droits des minorités. Il n’y a pas toujours d’activités purement compensatrices, car de nombreuses personnes sont motivés en partie pour des raisons autres que simplement avoir un but à atteindre. Le travail scientifique peut être motivé par un besoin de prestige, la création artistique pour exprimer ses sentiments, le militantisme social par hostilité. Néanmoins, en général, ces activités sont essentiellement compensatrices. Par exemple, la majorité des scientifique admettra probablement que la satisfaction qu’ils retirent de leur travail est plus importante que l’argent ou le prestige.
41. (en) Pour beaucoup, si ce n’est la majorité des gens, les activités compensatrices sont moins satisfaisantes que la poursuite de buts réels (ce sont des buts que des gens voudrait atteindre même si leur besoin de processus de pouvoir était déjà satisfait). Un bon indicateur de cette tendance en est, que dans la quasi-totalité des cas, les gens qui s’adonnent avec acharnement à des activités compensatrices ne sont jamais satisfaits, jamais totalement. Ainsi, le boursicoteur recherche toujours plus et plus d’argent. Le scientifique, à peine un problème résolu, se jette aussitôt sur le suivant. Le coureur de fond s’oblige à courir toujours plus longtemps et plus vite. Beaucoup de gens accaparés par leurs activités compensatrices prétendront qu’il s’épanouissent bien plus avec ces activités qu’avec la triviale nécessité de subvenir à leurs besoins naturels, mais c’est uniquement parce que dans notre société, cette nécessité à été réduite à sa plus simple expression. Plus grave, dans notre société, les gens ne satisfont pas leurs besoins vitaux de façon AUTONOME, mais en se comportant comme des rouages d’une énorme machine sociale. Par contre, les gens ont un grand besoin d’autonomie pour accomplir leurs activités compensatrices.
EFFONDREMENT DU PROCESSUS DE POUVOIR DANS LA SOCIÉTÉ MODERNE
59. (en) Nous divisons les désirs humains en trois groupes : (1) ceux qui peuvent être satisfaits avec un minimum d’effort ; (2) ceux qui ne peuvent être satisfaits qu’au prix d’un sérieux effort ; (3) ceux qui ne peuvent être satisfaits quels que soient les efforts accomplis. Le processus de pouvoir permet de satisfaire les désirs du second groupe. Plus il y a de désirs du 3ème groupe, plus cela génère frustration, colère, éventuellement défaitisme, dépression, etc.
60. (en) Dans la société industrielle, les désirs naturels de l’homme ont tendance à se retrouver dans les groupes 1 et 3, tandis que le deuxième groupe tend à regrouper tous les désirs artificiellement créés.
61. (en) Dans les sociétés primitives, les besoins physiques relevaient généralement du groupe 2 : ils pouvaient être satisfaits seulement au prix de gros efforts. Mais les sociétés moderne ont tendance à garantir le minimum vital [9] en échange d’un effort minime, ce qui fait que les besoins primordiaux y relèvent du groupe 1 (il peut y avoir désaccord sur le fait que le fait de conserver un travail est « minime », mais généralement, dans les boulots des couches basses et moyennes de la société, ce qu’on vous demande principalement, c’est l’obéissance. Vous restez assis ou debout là où vous a dit de rester, et faites ce qu’on vous a dit de faire de la façon dont on vous a dit le faire. Vous devez rarement vous impliquer sérieusement, et dans tous les cas, vous avez du mal à acquérir une certaine autonomie, et , ainsi, le processus de pouvoir ne peut pas être satisfait).
62. (en) Les besoins sociaux, comme le sexe, l’amour, et le statut social, relèvent souvent du groupe 2 dans la société moderne, suivant la position hiérarchique de l’individu. [10] Mais, à l’exception des individus qui ont un fort désir pour un statut social élevé, l’effort requis pour réaliser les désirs sociaux est insuffisante pour satisfaire le processus de pouvoir.
63. (en) Ainsi, certains besoins artificiels ont été créés pour relever du groupe 2, de façon à essayer de satisfaire le processus de pouvoir. La publicité et le marketing ont été développés de manière à ce que beaucoup de personnes éprouvent des besoins pour des objets que leurs grands-parents n’avaient jamais désirés ou même imaginés. Il faut gagner beaucoup d’argent pour satisfaire ces besoins artificiels, ce qui les fait relever du groupe 2 (Toutefois, voir paragraphes 80-82). L’homme moderne doit satisfaire son besoin de processus de pouvoir essentiellement en courant après les besoins artificiels créés par la publicité et le marketing au service de l’industrie [11] , et ce au travers des activités compensatrices.
64. (en) Il semble que pour beaucoup de gens, peut-être la majorité, ces formes artificielles du processus de pouvoir sont insuffisantes. Un thème qui apparaît régulièrement dans les écrits de la critique sociale de la 2ème moitié du 20e siècle est le sentiment d’inutilité qui accable de nombreuses personnes dans la société moderne (ce sentiment d’inutilité est souvent désigné sous d’autres termes comme « anomie » ou « vacuité de la classe moyenne »). Nous pensons que la soi-disant « crise d’identité » est à l’heure actuelle une recherche de sens, souvent sous la forme d’une activité compensatrice adéquate. Il est possible que l’existentialisme soit pour une grande part une réponse à ce sentiment d’inutilité. [12] La quête de l’épanouissement est très largement répandue dans notre société. Mais nous pensons que pour la majorité des gens une activité dont le but principal est l’épanouissement (c.à.d. une activité compensatrice) n’apporte pas un épanouissement réel et profond. En d’autres termes, il se satisfait pas totalement le besoin du processus de pouvoir (voir paragraphe 41). Ce besoin peut être pleinement satisfait uniquement au travers d’activités qui ont un but extérieur, comme les nécessités vitales, le sexe, l’amour, le statut social, etc.
65. (en) Pire encore, lorsque les buts passent par gagner de l’argent, gravir les échelons hiérarchiques, ou œuvrer comme un rouage du système d’une quelconque autre manière, la plupart des gens ne sont pas en position de poursuivre leurs buts de manière AUTONOME. Les travailleurs sont des employés standards, comme nous l’avons vu au paragraphe 61, doivent passer leurs journées à faire ce qu’on leur a dit de faire de la manière qu’on leur a dit de faire. Même la plupart des personnes à leur compte n’ont qu’une autonomie limitée. C’est la plainte constante des petits entrepreneurs comme quoi leurs mains seraient liées par une réglementation étatique abusive. Certaines de ces réglementations sont sans nul doute inutiles, mais elles sont le pendant essentiel et inévitable de notre société hautement complexifiée. Une grande partie des indépendants travaillent sous le régime de la franchise. Il a été rapporté il y a quelques années dans le Wall Street Journal que les sociétés franchisées faisaient passer aux postulants un test destiné à écarter ceux qui faisait montre de créativité et d’initiative, car de telles personnes ne sont pas suffisamment dociles pour se soumettre au système de la franchise. Ceci exclut ainsi beaucoup de gens qui ont un grand besoin d’autonomie.
Le texte intégral se trouve sur la page web consacrée à Théodore Kaczynski : La société industrielle et son avenir.
En savoir plus sur Théodore Kaczynski.
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Commentaires 1
Oui, je suis parfaitement d’accord avec son analyse. Pour évoluer dans ce type de société dite moderne,
il faut se montrer docile, voire soumis. La réflection n’a pas vraiment droit de cité, et ne demandez
surtout pas de discerner, si vous êtes moindrement réfractaire à l’autorité, vivre dans ce type de société
peut vous rendre mauvais…