Comment savoir que l’on est radin ?

Philippe est coach et auteur du livre « Soigner vos problèmes d’argent » dans le domaine de l’argent et du développement personnel. Chaque semaine, il publie sur Esprit Riche un article parlant d’argent et de ses secrets que nous avons parfois du mal à comprendre. Voici Philippe !

L’avarice est à la fois une attitude et des comportements qui consistent à vouloir conserver pour soi ses biens et richesses. Le but n’est pas forcément de gagner plus, mais de thésauriser de l’argent sans vouloir le dépenser ni maintenant, ni dans le futur.

C’est ce qui distingue l’économe de l’avare : l’économe gère son budget, épargne et investit pour une utilisation future. Il utilise pour cela la fonction de stockage de l’argent, alors que l’avare est polarisé sur la conservation d’un argent inerte et sans destination : sa fonction d’échange est annulée. Etre assis sur son tas d’or et le contempler jusqu’à se priver de beaucoup de choses, voire de tout, voilà le summum ! Au-delà des railleries dont ils sont l’objet (l’avare le plus célèbre est l’Harpagon de Molière), il y a une véritable souffrance psychique et un impact déplorable pour les relations avec l’environnement. Car, lorsqu’on est avare avec l’argent, on l’est souvent aussi avec les sentiments : tout est retenu, contenu et on exerce une sorte de terrorisme relationnel sur les autres dès qu’ils dépensent.
Cyril est technico-commercial dans le secteur industriel, il gagne bien sa vie. A plus de 50 ans, il a construit avec son épouse Dominique (cadre dans un hôpital) un patrimoine important, essentiellement placé sur des livrets bancaires. Ce sont plusieurs centaines de milliers d’euros (oui !) qui « dorment » sur ces comptes en attente de … rien. Ils n’ont jamais voulu investir dans l’immobilier ou la bourse (trop risqué et générateur de frais). Ils ont fait le choix de ne pas avoir d’enfants (ça coute cher !) bien que Dominique aurait aimé en avoir. Ils vivent depuis 25 ans dans un appartement 2 pièces dans une immeuble de banlieue, dont ils sont propriétaires. Chaque année, ils vont en vacances d’abord chez leurs parents âgés, puis au même camping. Cyril porte des vêtements à la limite de l’usagé, et il a reçu des remarques à ce sujet de la part de sa hiérarchie. Ils déclarent avoir une vie simple. Le prix est leur critère d’achat N°1, ils font leurs courses dans une grande surface « low cost ». Ils pointent soigneusement leurs tickets de caisse (sans refaire les aditions !) et font scrupuleusement leurs comptes. Ils n’ont jamais d’argent liquide sur eux, ne vont pas au restaurant et se distraient avec la télévision.
Pour une illustration vivante, je vous conseille le personnage joué par Fabrice Lucchini dans le film « le coût de le vie » (2002), très bon film sur les pathologies liées à l’argent. Il montre à la fois les comportements restrictifs et la souffrance qui l’accompagne. L’avare vit l’argent comme une partie de son propre corps. S’en séparer revient à lui en ôter une parie (d’où l’expression : ça coute un bras, ou un œil !). Son psychisme est basé sur des besoins de sécurité et de contrôle surdimensionnés et contraires au flux même de la vie.

Une dépense est un arrachement, c’est pourquoi elles sont limitées autant que possible à « l’indispensable au moindre cout ». Ce sont d’excellents « traqueurs de gaspi ». Le plaisir est quasiment absent de leur vie, la jouissance vient de la contemplation et de la maîtrise de leur avoir. Leur vie est donc austère et ils donnent l’impression de personnes froides et distantes. Leur difficulté à donner s’étend à l’affection, aux signes de reconnaissance, aux sentiments. Calculateurs et ayant peur de l’avenir, ils peuvent avoir des manifestations physiques importantes au niveau du système digestif : constipation (ne pas se séparer de ce qui a été ingéré), voire ulcères (en raison du souci qu’ils se font pour leur argent).
Rousseau dans L’Émile suggère de ne pas imiter l’avare : « Ne faites donc pas comme l’avare, qui perd beaucoup pour ne vouloir rien perdre ».

Lever les interdits liés au plaisir, instaurer une confiance dans le fait que la vie est abondante, apprendre les rudiments de l’intelligence émotionnelle, accomplir consciemment quelques dépenses « inutiles », accroitre son sentiment de sécurité intérieure, comprendre que l’argent ne les accompagnera pas dans la tombe, se donner le droit d’accéder à la joie, modifier ses croyances sur l’argent et sur la vie sont quelques une des pistes pour sortir de l’avarice.

Ce site utilise des cookies