Ce que je n’ai pas dit…

…lors de mon récent passage dans une émission de radio.

Si vous avez écouté l’émission vous vous souvenez peut-être qu’elle commence par la diffusion de propos recueillis en Belgique. Les 2 premières personnes qui témoignent de la perception qu’ils ont de leur salaire disent :

  • “Je gagne assez pour vivre” MAIS “mon métier n’est pas estimé à sa juste valeur si je regarde la valeur symbolique de mon salaire”
  • “La société estime devoir me payer juste ce qu’il faut pour que je puisse me débrouiller”
  • “Je trouve que les professions paramédicales ne sont pas assez payées”

Ces 2 personnes travaillent dans le secteur public.

Le troisième qui est commercial dit :

  • “pour mon age et vu que je n’ai pas de qualifications j’estime gagner assez”

Il y a eu d’autres phrases que j’ai noté :

  • “pour savoir si je gagne assez, tout est question de comparaison avec ce que gagnent les autres
  • “on a besoin de savoir où on se situe”
  • “le patron a le plus intérêt à ce que personne ne sache ce que gagnent les autres”

Plus loin dans l’émission, on entend des phrases comme “c’est la crise”. Si vous écoutez attentivement le message, il est horrifiant et à l’opposé du “développement personnel”. Si vous ouvrez l’oreille par delà les mots, vous entendrez le script invisible selon lequel réfléchissent ces personnes. Ce script, ces croyances, dirigent leur vie. L’émission est un condensé de la morosité ambiante et de l’impuissance apprise de la majorité des gens.

Petit voyage au coeur de l’impuissance apprise

Dans une expérience menée par des scientifiques, un phénomène surprenant fut constaté. En prenant un groupe de rats qui, pour accéder à de la nourriture, doivent recevoir un choc électrique ces scientifiques ont constaté qu’au bout d’un certain temps les rats ne font plus rien pour éviter un choc pourtant désagréable. Voici l’impuissance apprise à l’oeuvre. Voici comme l’on nous a appris à rester impuissant, les bras ballants, pendant que le monde nous présente des dizaines d’opportunités potentielles que nous ne sommes plus en mesure de voir.

L’impuissance apprise commence tôt dès l’école. Elle continue avec le rabâchage goubli-médiatique pensée unique qui vous montre à quel point c’est la crise depuis 30 ans et que la seule solution c’est le CDI. Elle est évidemment renforcé par votre environnement immédiat, les 5 personnes avec lesquelles vous passez le plus de temps.

Voici les erreurs de raisonnement qui nous conduisent à être paralysés comme un lapin voyant arriver une voiture plein feu droit sur lui :

  • nous perdons le lien entre la valeur que j’apporte et ma rémunération : dans le secteur public ce lien est biaisé (puisque c’est l’état qui détermine ce que vaut votre service) et l’on retrouve des professeurs devant gérer des classes d’élèves difficiles payés une misère, dans le privé c’est rarement mieux car la plupart des gens n’arrivent pas à expliquer concrètement en quoi leur action apporte de la valeur et ne voient pas comme vendre cette valeur à plus offrant. Toutes les distorsions entre la valeur sur un marché et ce que reçoit celui qui la produit conduit à cela.
  • nous réfléchissons en terme généraux : dans l’émission la journaliste me demande s’il est bien raisonnable de négocier son salaire en temps de crise. Pour ma génération, la crise a toujours existé. Mais la crise c’est un terme global. L’économie du pays n’est pas mon économie. Même si l’Europe perd de la vitesse (et continuera probablement d’en perdre), cela ne veut pas dire que je dois suivre la tendance. Peu importe si c’est la crise : il existe des secteurs qui marchent, des compétences qui sont valorisées. Réfléchir en globalité est le meilleur moyen de se déprimer soit parce que ma situation est pire que la moyenne, parce que je gagne moins que untel, parce que l’économie va mal alors je dois aller mal. Même si personne n’est isolé et que nous faisons tous partis de l’économie nous avons des marges de manœuvre. Voici un secret qui va faire regarder à certains journalistes pessimistes cet article comme une poule devant un couteau NOUS faisons l’économie et PAS l’inverse 🙂
  • nous finissons par accepter que rien n’est possible : lorsque vous ajoutez tous ces messages, par étonnant de finir par croire que rien n’est possible, de s’estimer heureux parce que “moi j’ai un emploi”. Mais il suffit de prendre un peu de recul pour voir qu’il existe beaucoup de possibilités. Vous devez d’abord en accepter la simple idée, une révolution personnelle à faire. Et vous verrez que si ça n’est pas dans ce pays, ce sera ailleurs. Si ça n’est pas dans votre métier, ce sera en faisant un autre. Si ça n’est pas dans votre entreprise, ce sera en rejoignant une autre.

Voici ce que tout ceci suppose : vous êtes bon dans ce que vous faites, vous êtes passionné, vous voulez avancer.

Ce site utilise des cookies