Que l’on soir un adepte de Nicolas Sarkozy (travailler plus pour gagner plus) ou bien d’Esprit Riche » (travailler moins pour gagner plus), la quête de revenus supplémentaires est très répandue et, d’une certaine manière, va de soi. Elle fait partie de ces évidences qu’en gagnant plus d’argent nous serons plus heureux, même si nous déclarons parallèlement que l’argent ne fait pas le bonheur (ce qu’on sait, par contre, c’est qu’il ne fait pas le bonheur de ceux qui n’en ont pas !). Plus heureux car plus de besoins satisfaits par des biens ou des services auxquels on ne pouvait accéder, plus de choix et de possibilités, plus de croissance et de développement, plus de, plus de plus de…
Mais est-ce si simple ? Le romancier américain Douglas Kennedy, dans son livre « Quitter le monde » nous invite à réfléchir plus loin que le bout de notre porte-monnaie.
« Là se trouve l’avantage de ne pas avoir beaucoup d’argent: on apprend à mener une vie intéressante sans nourrir des besoins incessants. C’est seulement quand on gagne beaucoup d’argent que l’on se retrouve convaincu de la nécessité de se procurer des choses auxquelles on ne pensait même pas auparavant et, une fois qu’on les a obtenues, on se met à convoiter ce qu’on n’a pas encore; une insatisfaction permanente s’ensuit, tandis que l’on se découvre prisonnier du désir d’acquérir toujours plus, de sacrifier à cette pulsion consumériste que l’on sait, dans les moments de lucidité, uniquement destinée à colmater les fissures de son existence. »
Reprenons le mécanisme bien décrit par le romancier.
1 : A condition d’en avoir suffisamment pour vivre décemment, le fait de « ne pas avoir beaucoup d’argent » nous invite à déployer notre vie en dehors de la consommation. Des activités simples, une attention à l’instant présent, une simplicité (pas forcément volontaire), un centrage sur l’essentiel sont effectivement très nourrissants.
2 : Mais, au fur et à mesure qu’on gagne plus d’argent, on accède à plus d’objets, de biens et de services qui nous satisfont car ils répondent à des besoins ou à des désirs réels jusque-là réfrénés. A ceux-ci s’ajoutent peu à peu ceux générés par les efficaces campagnes de marketing, ou tout simplement par son entourage (comment tu n’as pas encore de tablette ?)
3 : Cela installe un mécanisme de « toujours plus ». A la pleine jouissance de ce qu’on a succède, de plus en plus rapidement, un intérêt pour ce qu’on ne possède pas encore, et qu’il faut « à tout prix » se procurer (un appartement plus grand, une plus grosse voiture etc.)
4 : Le mécanisme se poursuivant au fil du temps engendre paradoxalement un fond d’insatisfaction permanent. L’attention est orientée sur ce qu’on n’a pas plutôt que sur ce qu’on a, on compare et on se compare, et on entre dans la Rat Race pour suivre le rythme. D’où la dépendance au travail et la perte de liberté : on ne peut plus quitter son emploi à cause du système de consommation (intégrant des crédits notamment) qu’on a mis en place. La Rat Race prend le dessus.
5 : On développe alors des sentiments négatifs, du stress que l’on va chercher à compenser dans une consommation qui va venir finalement masquer le vide de la vie, le manque de sens. Lorsqu’on mesure les indicateurs de bonheur perçu, nous nous situons derrière des pays comme l’Afghanistan ou l’Iran. Je fais l’hypothèse que ce mécanisme y est pour quelque chose.
1/ avoir une vision et un plan : gagner plus oui, mais pour quoi faire ou être. Si on y regarde de plus près, avoir pour avoir, l’argent pour l’argent concerne une catégorie de gens déterminés par la peur et l’insécurité. En mettant l’Avoir est au service de l’Etre et du Faire, on part de la finalité pour aller vers le moyen et non l’inverse. La question est donc de déterminer quel est le niveau d’avoir qui soutient tout cela.
2/ ne jamais systématiser et pérenniser des modes de consommation. Mangez dans un 3 étoiles et appréciez une pomme de terre cuite à l’eau. Dormez dans des 5 étoiles et faites du camping. Buvez uniquement de l’eau pendant un mois complet (boire est un besoin, pas un bon cru).
3/ apprécier et célébrer chaque détail de la vie qui est là, gratuitement, par la pleine conscience : relations, amis, biens, sa respiration, un paysage etc.
4/ gagner de l’argent en faisant ce qu’on aime. Vous éviterez ainsi de compenser une vie professionnelle pénible par une consommation excessive.
Il y a sans doute mille autres manières de ne pas « tomber dans le panneau ». Quelles sont les vôtres ?
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