Inflation : votre ticket de caisse est en feu pendant que les profits de l’agroalimentaire explosent

L’inflation fait rage et ne faiblit pas. + 18 % sur l’alimentaire, + 45 % sur l’électricité. Mais dans le fond, d’où vient l’inflation ? Et qu’est-ce que ça veut dire quand un pays n’arrive plus à la maîtriser, comme l’Argentine ?

C’est ce qu’on va voir aujourd’hui. Car pendant que votre caddie de courses a pris 20 %, les industriels de l’agroalimentaire, eux, affichent des marges record.

Mais au lieu de céder à la tentation de pointer du doigt, étudions un peu mieux ce phénomène et évoquons comment s’en protéger.

Pourquoi les prix augmentent ?

La première question, qui a l’air simple comme ça, c’est : pourquoi les prix augmentent-ils ? L’un des facteurs, c’est l’augmentation des coûts de production. L’un des facteurs, c’est l’augmentation des coûts de production.

Évolution des coûts de production moyens annuels

Évolution des coûts de production moyens annuels. Source : INSEE

Sur ce graphique, vous avez l’évolution des coûts de production dans plusieurs secteurs, On observe qu’en un an, ces coûts ont augmenté de 20,9 % dans l’agriculture (c’est la courbe verte) et de 23,2 % dans l’industrie (en jaune).

Cela se répercute sur la marge des entreprises. La marge, c’est la différence entre le prix de vente et les coûts de production.

Lorsque les coûts de production augmentent considérablement et de manière prolongée, l’entreprise doit augmenter ses prix pour pouvoir conserver tout ou partie de sa marge, et survivre.

Elle doit alors trouver jusqu’à quel niveau elle peut augmenter son prix sans perdre de clients. Car si elle augmente trop son prix, les consommateurs risquent d’aller voir la concurrence ou de renoncer à certains achats.

Évidemment, ça va être plus facile pour les entreprises qui ont une image de marque comme Coca Cola ou qui commercialisent des produits nécessaires comme l’électricité, parce qu’elles ont ce qu’on appelle un pouvoir de marché.

Quand une entreprise augmente son prix de vente mais à un niveau moindre que l’augmentation de ses coûts de production, sa marge baisse.

Mais voyez comment on peut aussi détourner le mécanisme. Maintenant que les consommateurs ont accepté la hausse des prix, les entreprises peuvent continuer sur cette voie même si leurs coûts de production se réduisent. Ainsi, leur marge augmente.

 

Hausse considérable des marges dans l’agroalimentaire

C’est ce qui a été observé dans l’agroalimentaire.

Évolution du taux de marge de l'industrie agroalimentaire française

Évolution du taux de marge de l’industrie agroalimentaire française. Source : Alternatives économiques

Sur ce graphique, vous voyez que le taux de marge est désormais de 48,1 %, bien supérieur au taux d’il y a un an (28,2 %). Et on ne peut même pas dire qu’il soit revenu au niveau avant covid. Il faut remonter 30 ans en arrière pour retrouver un tel niveau.

D’après une étude du FMI, la hausse des bénéfices des entreprises représente près de la moitié de l’augmentation des prix en Europe ces deux dernières années.

C’est donc bien au-delà de ce que l’augmentation des coûts de production exigeait. D’autant que les prix agricoles ont diminué d’environ 8 % depuis le pic de début 2022, on est même à -25,3 % pour les céréales.

Bien sûr, les industriels se défendent en expliquant que c’est un effet de rattrapage pour compenser les pertes des deux dernières années. Sauf que le bond est énorme en un an, et que quand il y a des gens qui peinent à se nourrir, ça n’est pas bien vu. Une solution aurait peut-être été de lisser cela sur plusieurs années.

Et les industriels ne sont pas les seuls à faire augmenter leur marge sur fond d’inflation. D’après le rapport annuel de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, la hausse de marge de la grande distribution a aussi flambé : +57 % ! 

On a donc ici une première réponse à la question “Pourquoi les prix augmentent-ils ?”

Du coup, le gouvernement appelle les grands groupes à retourner à la table de négociation et annonce le blocage des prix de 5000 produits.

Pour autant, l’État aussi profite de l’inflation. En effet, la TVA augmente mécaniquement avec les prix de vente.

 

Pourquoi l’État ne peut pas véritablement lutter contre l’inflation

Et ce n’est pas tout. En réalité, l’État a les pieds et poings liés. Il ne peut pas véritablement lutter contre l’inflation comme il le devrait. Pour comprendre pourquoi, il faut d’abord revenir sur ce qui cause l’inflation d’après les économistes monétaristes.

Les prix augmentent quand il y a plus de monnaie en circulation que de produits et services à se procurer. En effet, les agents économiques disposent de plus de monnaie, mais le système productif ne peut pas, à court terme, s’ajuster à une hausse de la demande, ce qui entraîne la hausse des prix. Pensez à la distribution gratuite d’argent pendant le covid par exemple.

Alors pour stopper l’inflation, il faut réduire la quantité de monnaie en circulation. C’est là que les banques centrales interviennent avec comme outil les taux d’intérêt. Leur but, c’est que les gens consomment moins, voire même, paradoxalement, que le chômage augmente.

En augmentant les taux d’intérêt, les prêts sont plus chers et les agents économiques sont donc moins incités à emprunter. Ils ont moins d’argent pour acheter. Mécaniquement, la demande baisse et les prix suivent.

Alors pourquoi la BCE ne relève-t-elle pas davantage les taux, me direz-vous ?

Déjà, pour ne pas freiner l’activité économique et l’emploi. Il ne faut pas que le remède soit pire que le mal. Mais il y a un autre motif.

 

La France est trop endettée pour lutter efficacement contre l’inflation

La France est très endettée : plus de 3.000 milliards d’euros. Cela s’explique par son modèle social (un point commun avec l’Argentine, on y reviendra), mais aussi parce que ça fait 50 ans qu’elle alimente ainsi artificiellement la croissance. Je vous en parlais dans cette vidéo.

Or, les taux d’intérêt déterminent aussi le service de la dette. Plus les taux augmentent, plus la nouvelle dette est chère à rembourser.

Si le service de la dette devient supérieur à la croissance, le pays est dans une trappe à dette. Comme l’explique Charles Gave : “La dette augmente exponentiellement plus vite que le PIB. Il n’y a plus de porte de sortie”.

Le pays dans cette situation finit par faire défaut sur sa dette et plus personne ne veut lui prêter, à l’exception du FMI dans un cadre bien précis. Je vais en reparler avec le cas de l’Argentine.

Il faut donc éviter de tomber dans cette trappe à dette. Quand on ne peut pas augmenter les taux, la seule solution, c’est de laisser la dette se dissoudre dans l’inflation.

On dit qu’un pays dissout sa dette dans l’inflation lorsque le taux réel, c’est-à-dire le taux des obligations d’État à 10 ans moins le taux d’inflation, est négatif.

Quand on prend les chiffres officiels pour ces deux indicateurs, que constate-t-on ?

Que le taux réel était à la limite du négatif voire légèrement négatif entre 2012 et 2017, et qu’il est largement négatif depuis 2017. Et ça, c’est avec les chiffres officiels !

Évolution du taux des obligations d’État françaises à 10 ans

Évolution du taux des obligations d’État françaises à 10 ans. Source : Investing.com

Évolution de l'inflation

Évolution de l’inflation. Source : france-inflation.com

Alors si l’inflation arrange l’État en raison de sa dette, qui sont les perdants ? Réponse : les épargnants, les retraités, les détenteurs d’assurance-vie.

C’est ce que Keynes appelait la nécessaire euthanasie du rentier.

Le cas de l’Argentine

Je vous propose maintenant de regarder le cas de l’Argentine d’un peu plus près. Comment un pays qui, il y a encore un siècle, était l’un des plus riches d’Amérique Latine a-t-il aujourd’hui un taux d’inflation de 124 % ? Et surtout, comment les Argentins font-ils pour essayer de s’en sortir ?

On va commencer par un chiffre hallucinant. Avec 20.000 pesos en 2001, vous pouviez acheter une voiture. En 2019, vous pouviez à peine acheter un smartphone bas de gamme. Et ça, c’est quand l’inflation n’était qu’à 53 %. Aujourd’hui, vous n’achetez plus que 4 paquets de couches.

Et le pain qui vous coûtait 4 pesos en 2008 en vaut aujourd’hui plus de 1000.

Inflation en Argentine : comment en sont-ils arrivés là ?

Déjà parce que le pays s’est endetté pour financer de nombreux programmes d’aide sociale, un service public démesuré et sa politique d’augmentation des salaires.

C’était la base du péronisme, avec en face de ça, une politique isolationniste visant à protéger les travailleurs de la concurrence étrangère. En gros, ils sont allés à fond dans un socialisme à tendance communiste mais sans avoir les ressources, l’influence et la capacité de prédation de la France.

Pour continuer de financer ses programmes d’aide, le pays est obligé de s’endetter. Et pour rembourser sa dette, il fait tourner la planche à billets. Conséquence : les prix augmentent.

En 2001, l’État argentin fait faillite, fait perdre leur épargne à des milliers de personnes et perd dans la foulée la confiance de ses citoyens et de ses créanciers. La parité entre le peso et le dollar n’est plus. Par sa stabilité, le dollar devient une valeur refuge pour les Argentins.

Alors qui va bien vouloir encore prêter à l’Argentine ? Vous l’avez deviné, le FMI, qui exige de l’Argentine qu’elle règle sa dette en dollars. L’État fait donc tout pour les confisquer : il taxe lourdement les exportations, limite la quantité de dollars que les Argentins peuvent acheter chaque mois et supprime les aides à quiconque achète des dollars.

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Le quotidien des Argentins face à l’hyperinflation

Aujourd’hui, 42 % de la population argentine vit en dessous du seuil de pauvreté (contre 17 % en France). Les Argentins ont plusieurs emplois pour essayer de joindre les deux bouts, car même les aides ne suffisent pas, vous vous en doutez. Les soupes populaires n’arrivent plus à nourrir tout le monde, car il y a de plus en plus de gens et la nourriture coûte de plus en plus cher.

Les prix fluctuent considérablement du matin au soir. Du coup, les grosses dépenses, comme une voiture ou de l’immobilier, se font en dollars.

Les commerçants ont bien du mal à planifier quoi que ce soit et sont obligés de mettre à jour leur étiquetage plusieurs fois par jour. Pour ne pas perdre leur clientèle, ils n’ont pas d’autre choix que d’ouvrir des ardoises par centaines et même de proposer des paiements étalés sans intérêt pour une simple paire de chaussures.

Vous vous dites peut-être que c’est assez peu probable que ça arrive en France, mais c’est quand même arrivé à un pays qui, au début du siècle dernier, était encore une superpuissance sur son continent.

Comment les Argentins survivent-ils à l’inflation ?

Ils dépensent leur argent très vite dès qu’ils sont payés, puisque leurs pesos perdent de leur valeur d’une demie-journée à l’autre. Donc ils achètent énormément et font du stock.

Ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter neuf ou d’occasion se portent sur le troc. Et c’est intéressant parce que ce n’est pas toujours un objet contre un objet. Certains organisateurs distribuent des tickets et ce sont ces tickets qui servent aux échanges. C’est un peu comme des devises locales.

Ceux qui ont de quoi épargner se tournent vers le dollar ou vers les cryptomonnaies. Comme l’achat légal de dollars est limité à 200 par mois, il existe tout un marché noir avec son propre taux de change

Quant aux cryptos, malgré leur volatilité, elles apparaissent évidemment comme étant plus fiables que le peso aux yeux des Argentins. Et le paiement en crypto était assez répandu : 30 % de la population utilisaient des stablecoins pour leurs achats quotidiens.

À noter toutefois que le gouvernement a décidé plus tôt cette année dinterdire l’utilisation des cryptomonnaies non réglementées par la Banque centrale argentine dans les applications de paiement et dans les transactions bancaires. Évidemment pour garantir la sécurité des utilisateurs !

Le résultat des élections de ce week-end pourrait être déterminant pour l’avenir du pays. Nous verrons bien ce que cela donne.

 

Comment se protéger de l’inflation ?

Voilà pour la parenthèse argentine. Maintenant voyons ce que vous pouvez faire pour vous protéger de l’inflation en France.

Traditionnellement, vous allez vous tourner vers les métaux précieux, qui sont une forme de garantie. D’autre part, les actions de grandes sociétés internationales. Et enfin, les actifs qui stockent de la valeur, comme les œuvres d’art.  Si ça vous intéresse d’apprendre à investir hors des banques, je vous apprends à faire cela ici.

En réalité, l’inflation existait déjà avec le quantitative easing (assouplissement quantitatif), qui dilue la valeur de la monnaie. Le truc, c’est que la plupart des gens ne s’en rendaient pas compte car le prix des actifs augmentait tranquillement.

Mais depuis la hausse des taux, les gens commencent à comprendre que la hausse du prix des actifs était en bonne partie due à la baisse de la valeur de l’argent. Du coup, tous les actifs alignés sur l’inflation sont intéressants à posséder, comme l’immobilier et les actions de grandes sociétés internationales.

Retrouvez cette analyse en vidéo :

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Commentaires 2

  1. Moralité de l’histoire : investir dans les matières premières pour se diversifier

    Personnellement, je n’en possède pas.

    Parce que je préfère capitaliser sur la bourse et l’immobilier. D’autant plus que l’immobilier est une bonne protection contre l’inflation.

    Avant la crise, j’ai acheté quelques pièces d’or Kruggerang pendant que le cours de l’or était relativement intéressant. Depuis la guerre en Ukraine et Israël-Hamas, le prix de l’or a littéralement décollé.

    Malheureusement, comme le dit l’adage : “le malheur des uns fait le bonheur des autres”…

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