Bernard Arnault : Comment a-t-il construit son empire ?

Comment devient-on l’homme le plus riche du monde ? C’est ce qu’on va voir aujourd’hui avec ce portrait de Bernard Arnault, le PDG du plus grand groupe de produits de luxe au monde.

Certains pensent que pour devenir milliardaire, il faut forcément venir d’une famille fortunée. Ce n’est pas tout à fait le cas de Bernard Arnault. Le plus impressionnant de son parcours, c’est sa capacité de travail, sa vision stratégique et sa gestion habile des affaires.

Il démarre sa carrière dans le bâtiment avant de transformer des marques de luxe en véritables icônes internationales. Aujourd’hui, le groupe LVMH est le leader mondial des industries du luxe. L’année dernière, son chiffre d’affaires a avoisiné les 80 milliards d’euros, et son résultat opérationnel courant dépassait les 21 milliards, soit une croissance de 23%.

Le groupe est présent à la fois dans la mode et la maroquinerie, les vins et spiritueux, la distribution sélective, les parfums et cosmétiques, l’horlogerie-joaillerie et la presse.

Les marques du groupe LVMH

Les marques du groupe LVMH. Source : zonebourse

Alors comment Bernard Arnault a-t-il bâti sa réussite ? C’est ce qu’on va voir ensemble.

Les débuts de Bernard Arnault

Bernard Arnault naît le 5 mars 1949 à Roubaix. Il est exposé au monde des affaires dès son plus jeune âge puisque son père, Jean Léon Arnault, est propriétaire de l’entreprise de BTP Ferret-Savinel. Cette entreprise emploie un millier de personnes et avait été fondée 25 ans plus tôt par le grand-père maternel de Bernard Arnault, au lendemain de la première guerre mondiale, dans une France en grand besoin de reconstruction.

Bernard reçoit de son père le goût de l’entrepreneuriat. Il apprend aussi la valeur du travail acharné et de la persévérance.

Après ses études à Polytechnique, il rejoint l’entreprise familiale en tant qu’ingénieur en 1971. Il a alors 22 ans.

En 1976, il convainc son père de vendre l’affaire de BTP, une activité en perte de vitesse, pour se concentrer uniquement sur la promotion immobilière. Jean Arnault se laisse convaincre par son fils, dont il perçoit très tôt le génie, et par le montant : 40 millions de francs. C’est ainsi que la fortune familiale des Arnault se développe.

La société est rebaptisée Ferinel et se démarque par son idée de produit très marketing, dans un milieu qui découvre à peine ces techniques. Le slogan est simple : faire de vous un « propriétaire à la mer ou à la montagne ».

Bernard continue de gravir les échelons et prend la direction de l’entreprise. Il n’a pas encore trente ans.

En cinq ans, Ferinel devient le nº1 français des promoteurs immobiliers d’habitation.

En 1981, craignant que la politique socialiste de François Mitterrand n’entrave l’investissement, il part pour les États-Unis, à l’époque La Mecque des entrepreneurs.

 

Bernard Arnault reprend Boussac

Lorsque Laurent Fabius entre au gouvernement trois ans plus tard, Bernard Arnault revient en France.  Nous sommes en 1984, Arnault a 35 ans. Il est à la recherche d’entreprises à reprendre et son ami Pierre Godé lui présente alors le dossier Boussac Saint Frères. Il s’agit d’un gros groupe textile en faillite et dont le gouvernement ne parvient pas à se délester. C’est la plus grande faillite industrielle française à l’époque, faisant perdre 100 millions de francs par mois à l’État.

Pourquoi Bernard Arnault tenait-il tant à racheter un groupe textile en perdition, lui qui venait du monde du bâtiment et de l’immobilier ? Boussac avait surtout un joyau : la prestigieuse marque Christian Dior Couture. C’est Dior qui intéressait Arnault.

Dans un premier temps, il propose aux frères Willot, propriétaires de Boussac depuis 4 ans, de leur racheter Dior Couture, mais ceux-ci refusent : c’est tout ou rien. Malgré le scepticisme de son entourage, Arnault met en place sa stratégie pour reprendre Boussac dans son intégralité. Il est déterminé à avoir Dior.

Alors comment un promoteur immobilier est-il choisi par les pouvoirs publics pour reprendre un groupe textile qui emploie encore 15.000 salariés ?

Bernard Arnault à son retour des États-Unis. Il a 35 ans.

Bernard Arnault à son retour des États-Unis. Il a 35 ans. Source : Challenges

Sous-estimé, Bernard Arnaud surprend

C’est là qu’entre en jeu une qualité de Bernard Arnault qui va lui servir tout au long de sa carrière : savoir nouer les bonnes relations auprès des personnes haut placées et qui peuvent l’aider à atteindre ses objectifs. Dans l’affaire Boussac, il s’agira notamment des pouvoirs publics, qui vont avoir le dernier mot sur le choix du repreneur, et des banques, pour obtenir le cash nécessaire.

Ainsi, alors que les Willot cherchaient plutôt un cinquième associé, Bernard Arnault joue de sa proximité géographique et de sa relation avec eux pour les convaincre de racheter leurs parts à la veille de la mise en liquidation. Il ne veut pas être un simple associé, il veut le contrôle de la société.

Il s’efforce ensuite de convaincre les différents ministères concernés de repousser la liquidation et de lui faire confiance. Mais on le sous-estime : il est jeune et n’a pas d’expérience dans le textile.

Il va alors surprendre tout le monde en s’assurant du soutien de pointures de la finance, telles que le banquier Antoine Bernheim, de la banque Lazard. Il sera aussi suivi par le Crédit lyonnais. Les deux banques l’aident à rassembler 310 millions de francs en plus des 90 millions qu’il apporte avec ses proches.

Dans la biographie Bernard Arnault ou le Goût du pouvoir sortie en 1990, il est décrit comme ayant cette capacité à impressionner les gens qu’il rencontre, un gros atout pour obtenir le soutien de personnes influentes. Il devient d’ailleurs le protégé d’Antoine Bernheim, auprès de qui il va acquérir une maîtrise parfaite de la finance.

Au terme de plusieurs concours publics et renégociation de dettes, Bernard Arnault finit par l’emporter contre Maurice Bidermann, professionnel du textile et déjà candidat à la reprise en 1978.

L’industrie du luxe voit le jour

Une petite anecdote : ce n’était pas la première fois que la famille Arnault croisait le chemin de la société Boussac puisque pendant l’entre-deux-guerres, Ferret-Savinel avait été chargée de construire une usine pour Boussac, alors en pleine gloire.

Arnault abandonne ensuite très vite l’activité textile du groupe, contrairement aux promesses faites à l’État, pour se concentrer sur l’industrie du luxe, son objectif dès le départ.

Il se rend compte que Dior Couture a trop de licences et pas assez de boutiques exclusives, une collection qui ne séduit pas, une mauvaise culture d’entreprise, etc. Tout un cumul de défauts qui peuvent être corrigés et qui ne sont rien en comparaison de l’atout que représente une marque aussi symbolique que Dior.

En deux-trois ans à peine, il remet Boussac sur le chemin de la rentabilité, avec un cashflow de 100 millions de francs. La reprise de Boussac constitue le premier échelon dans son ascension vers LVMH.

Un fait intéressant, c’est que Boussac possède Dior Couture mais plus les parfums Dior, cédés à Moët-Hennessy lors d’une précédente restructuration. Bernard Arnault tente d’arriver à un accord avec Moët concernant Dior, en vain.

Après Boussac, il rachète Céline, puis lance une nouvelle maison de haute-couture, Christian Lacroix.

Le groupe Arnault à la fin des années 1980

Le groupe Arnault à la fin des années 1980. Source : biographie Bernard Arnaud ou le goût du pouvoir

La méthode Arnault pour dégager du cash

Autre point intéressant : Auprès de son mentor banquier, Arnault apprend une technique baptisée les poupées russes. C’est une structure à base de holdings qui permet de garder le contrôle d’une affaire tout en générant du cash à coup d’introductions en bourse.

Comment ça marche ? Au lieu de contrôler la société A en détenant 51 % de son capital, vous détenez 51 % du capital de la société B, purement financière, qui elle-même détient 51 % du capital de la société A. Et ainsi de suite.

Pour générer du cash, il suffit d’introduire une minorité du capital d’une poupée russe en bourse. Cela permet ensuite d’attaquer les sociétés que l’on cible en se passant des banques.

Bernard Arnault prend le contrôle de LVMH

La fusion Moët-Hennessy et Louis Vuitton

En juin 1987, le maroquinier Louis Vuitton fusionne avec le champion des vins et spiritueux Moët-Hennessy.

Pourquoi ? Parce que Moët était visé par une attaque. Un inconnu amassait un grand nombre d’actions tandis que les familles fondatrices ne détenaient plus que 22 % du capital. Apparemment, le prédateur aurait été un ami de Bernard Arnault, spécialiste du chantage financier ou greenmailing.

Il s’agit d’une tactique par laquelle un investisseur accumule subtilement des actions de la société cible au prix du marché sans payer de prime de contrôle, mettant ainsi un pied dans la société. Puis, une fois devenu un actionnaire important, il menace d’en prendre le contrôle. Pour éliminer cette menace, le conseil d’administration de la cible rachète à prime la participation de cet investisseur.

Moët cherche donc à se protéger de cette attaque en se rapprochant de la banque Lazard, dont le nº2 n’est autre que le mentor de Bernard Arnault. Et au final, la solution qui est adoptée c’est de fusionner avec Louis Vuitton. C’est la naissance de LVMH, un groupe de 13 milliards de francs de chiffre d’affaires, 23 milliards de capitalisation boursière et 10% de rentabilité.

Sur le papier, ces deux sociétés étaient gérées de manière similaire,  avaient la même clientèle cible, le même genre de culture d’entreprise, etc. Leur fusion ne pouvait que donner naissance à un géant français.

Mais il y a un élément qui va beaucoup fragiliser LVMH : ce sont les dissensions et les tensions entre les deux coprésidents, Henry Racamier (LV) et Alain Chevalier (MH). Tous les deux voulaient diriger et avoir le dernier mot sur le moindre détail. Leur envie respective de se débarrasser de l’autre va permettre à Bernard Arnault de s’immiscer à pas de loup chez LVMH.

Bernard Arnault, le loup en cachemire

En octobre 1987, quelques mois à peine après la fusion, l’action LVMH est en chute libre. Suite au krach boursier, elle a perdu 50 % de sa valeur. Arnault a les crocs et est prêt à passer à l’attaque immédiatement. Toutefois, son mentor lui conseille d’attendre que ce soit Racamier et Chevalier qui viennent à lui.

Bernard Arnault commence à acheter ses premières actions, petit à petit, et cherche du financement. Le cours est alors aux alentours de 12,50 francs.

Comme l’avait prédit Antoine Bernheim, Racamier finit par contacter Arnault en secret. Son objectif ? Évincer Chevalier. Il ne soupçonne rien des projets d’Arnault et le juge trop jeune pour être dangereux. À l’époque, Arnault n’a que 35 ans. Mais Arnault se réunit secrètement avec Chevalier également. Chacun des deux coprésidents pense avoir trouvé un allié de taille pour évincer l’autre. En réalité, Arnault va les duper tous les deux.

Henry Racamier, Alain Chevalier et Bernard Arnault

Henry Racamier (Louis Vuitton), Alain Chevalier (Moët-Hennessy) et Bernard Arnault. Source : Le Figaro

En juillet 1988, Bernard Arnault détient déjà 27 % de LVMH. Il a besoin de plus d’argent pour continuer sa progression. Avec la technique des poupées russes , il obtient 3,3 milliards de francs pour continuer à acheter des titres. Il était convaincu que son plan allait fonctionner. C’est pourquoi il a continué d’acheter des actions même quand le cours atteignait des niveaux record. Tandis que ses adversaires, voyant le cours monter, vendent pour encaisser une énorme plus-value. Arnault a été le seul à avoir une vision long terme.

Début 1989, en l’espace de quelques jours, Arnault devient actionnaire majoritaire. Il ne lui aura fallu que 6 mois pour prendre la tête de la société la plus chère de France à l’aube de son 40e anniversaire.

Une ascension ultra-rapide

La fusion de Boussac et LVMH marque le début de sa trajectoire extraordinaire dans le secteur du luxe. Entre son retour des États-Unis et son arrivée à la tête de LVMH, il ne se sera écoulé que 5 ans.

Arnault avait compris, bien avant tout le monde, que l’industrie du luxe était un véritable secteur avec un potentiel de bénéfices comme nul autre.

 

L’empire de Bernard Arnault

À force de rachats et de montages financiers sophistiqués, Bernard Arnault a fait de LVMH le numéro 1 mondial du luxe. 90 % du CA du groupe est réalisé à l’export.

Tout n’a pas été que réussite. Il a notamment perdu son combat titanesque contre François Pinault pour le contrôle de Gucci en 1999. Et il n’arrivera jamais à faire décoller Christian Lacroix, qu’il revendra en 2005.

Il a créé un fonds d’investissement, qui lui a permis de mettre la main sur le vignoble bordelais Cheval Blanc.

Il est à l’origine de la Fondation Louis-Vuitton, qui se trouve au bois de Boulogne. C’est là qu’il développe son œuvre de mécénat dans l’art contemporain.

Bernard Arnault a aussi multiplié les investissements dans la presse.

En 2021, la Samaritaine, racheté par LVMH 20 ans plus tôt, a rouvert ses portes. Et Tiffany & Co. a rejoint le groupe.

À la fin de sa biographie, Bernard Arnault déclarait qu’il prendrait sa retraite bien avant ses 70 ans. Le temps lui aura donné tort !

 

Bernard Arnault, entre conquistador et terminator

Les 3 valeurs de LVMH

Dans le discours qu’il a prononcé en 2017 à Polytechnique, il a mis en avant les 3 valeurs de LVMH :

Premièrement, la créativité, l’innovation et la recherche, le tout tourné vers le pragmatisme. Il a d’ailleurs toujours été en avance sur son temps et visionnaire (montages financiers, marketing, etc.)

C’est quelqu’un qui a l‘état d’esprit à la fois de l’ingénieur et de l’artiste. De surcroit, c’est un génie de la finance.

Deuxièmement, la recherche de l’extrême qualité.

Troisièmement, l’esprit d’entreprise. Dans sa biographie, on apprend que l’un de ses ancêtres était colonel dans l’armée de Napoléon. Et que le petit Bernard admirait toujours son portrait dans la maison familiale.

On retrouve chez l’entrepreneur et l’homme d’affaires Arnault un très fin stratège, visionnaire, avide de pouvoir et de contrôle. Il a d’ailleurs déclaré : “Les gens pensent que les hommes politiques ont le pouvoir. Mais c’est de moins en moins vrai. La politique est éphémère. Les entreprises, elles, ont une durabilité qui garantit le seul pouvoir qui en vaille la peine.[…] J’ai la chance de pouvoir dire ‘je veux que mon groupe soit dans telle position d’ici 10-20 ans’ et ensuite je n’ai plus qu’à bâtir un plan pour atteindre cet objectif.”

Trois autres atouts de Bernard Arnault

Quelles sont les autres caractéristiques de la personnalité de Bernard Arnault qui lui ont permis une ascension aussi fulgurante ?

Il aurait déclaré “Soit on est particulièrement doué, soit il faut travailler dur. Moi, je n’étais pas assez doué, donc j’ai travaillé”. Les gens qui le côtoient le jugent brillantissime. En réalité, son atout c’est de démultiplier son intelligence avec sa force de travail. Il a toujours aimé apprendre, depuis tout petit quand il accompagnait son grand-père et son père sur les chantiers.

Cette soif d’apprendre est sans doute due à son esprit de compétition. Il reconnaît lui-même : “Je veux toujours gagner”. Cette ambition est nourrie d’une vision long terme incroyable, qui lui permet aussi d’être le fin stratège qu’il est.

Il est aussi obsédé par l’efficacité. Il est donc très exigeant envers ses employés. Ainsi, après avoir pris la tête de LVMH, il avait déclaré que son objectif à 6 mois était d’améliorer la motivation de ses employés.

Bernard Arnault a été surnommé le loup en cachemire, pour la manière dont il s’est saisi de LVMH sous ses apparences raffinées.

J’avais aussi lu un article dans la presse qui le situait entre un Conquistador et un Terminator. Ce n’est pas sans rappeler son ancêtre napoléonien et la grande froideur avec laquelle il s’est joué des deux coprésidents de LVMH à l’époque.

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